Tahun ! Tahun ! Tahun !
La mobilisation ne faiblit pas
après le feu vert à la réouverture de
l’ancienne carrière du Tahun
Campagne de financement participatif
Sauvons le site naturel de l'ancienne Carrière du Tahun !
Documents officiels
(pour accéder, cliquez sur les mots en gras)
-
Arrêté préfectoral n° 2022/ICPE/439 autorisant la société PIGEON CARRIERES à exploiter une carrière de roches massives et des installations de traitement des matériaux au lieu-dit « Le Tahun » à Guéméné-Penfao
-
Dossier de demande d’autorisation d’exploitation au titre des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (version juin 2015 complétée en novembre 2017) – Fascicule 2 : Etude d'impact
-
-
Annexe 1 : Rapport de synthèse des sondages – LCBTP
-
Annexe 2 : Résultats LERES
-
Annexe 3 : Note technique amiante et granulats
-
Annexe 4 : Simulation CADNAA
-
Annexe 5 : Plan de gestion des déchets d’extraction
-
Annexe 6 : Caractérisation des déchets inertes et des terres polluées résultant de l’exploitation des carrières – Laboratoire CBTP
-
-
Avis délibéré de la mission régionale d’autorité environnementale des Pays-de-la-Loire – Demande d’autorisation d’exploitation de la carrière de Tahun (Avis MRAE)
-
Cartes annexe arrêté préfectoral d'autorisation - 30-06-23 - ANNEXES AP AEU TAHUN PIGEON Guémené-Penfao
Une industrie, des besoins…
Force est de constater que les industries extractrices, les groupes spécialisés dans la fourniture de granulats et autres matériaux pour la construction et le BTP (et l’exploitation des déchets qui en découlent), n’entendent pas désarmer, bien au contraire. Les acteurs de ce secteur, où disposer de carrières est le nerf de la guerre concurrentielle, veillent – en principe – à cocher toutes les cases qui leur sont demandées (documents, études, procédures) et à faire valoir le fait que tout est réalisé dans les règles et, tout particulièrement, dans le respect de toutes les exigences légales en matière d’environnement, de gestion des flux, des eaux usées, des déchets, etc.
Il ne s’agit pas de nier la réalité des besoins en matériaux de construction (routes, bâtiments, grands aménagements et travaux publics) ou en solutions de traitement des déchets du BTP (en l’occurrence, avant tout, de déchets inertes issus des opérations de « déconstruction »). A condition d'apporter immédiatement le gros bémol suivant : bien des projets et chantiers (et, comme par hasard, souvent parmi les plus grands) ne se justifient ni dans leur principe même ni dans leurs modalités au regard des urgences environnementales de notre temps !
Du point de vue de la matière première, l’on peut diviser les activités de ces industries extractrices entre l’exploitation de roches dites massives (les roches consolidées, sédimentaires ou métamorphiques) et l’exploitation de dépôts sédimentaires, alluvionnaires ou marins – ces gravières et sablières à l’égard desquelles les « industriels du maraîchage » ont développé une coupable dépendance, aux effets pernicieux, comme on ne le sait que trop bien du côté de Saint-Colomban…
L’on se doute bien que les besoins en granulats et autres matériaux sont particulièrement importants dans un département – la Loire-Atlantique – qui compte déjà 1,5 million d’habitants, dont la population ne cesse d’augmenter, et où (par delà tous les problèmes conjoncturels des secteurs de l’immobilier et du BTP) l’on se trouve sur un marché en tension (déficit de logements, tout particulièrement sociaux, nouveau CHU [encore un projet contestable et contesté], etc.). Et inutile de dire qu’en Île-et-Vilaine aussi, les besoins n’ont rien d’insignifiant.
Ajoutons, sur cet aspect du problème, que, à part, bien sûr, pour les personnes habitant à proximité immédiate de ces lieux, et nonobstant la question, assurément majeure, des norias de camions qui transportent tous ces matériaux, les carrières ont l’exploitation plutôt discrète, étant souvent quelque peu excentrées et tendant à se cacher derrière des rideaux de végétation, arbres et autres – comme c’est d’ailleurs largement le cas au Tahun (où, lorsqu’on se tient du côté de la chapelle des Lieux-Saints, à quelques dizaines de mètres du « précipice », l’on ne voit rien). C’est bien d’ailleurs là la principale « qualité » qui les a fait choisir par les liquidateurs de toutes les époques pour commettre leurs exactions criminelles – inutile d’aller bien loin, il suffit de regarder du côté des anciennes carrières de Gigant et de la carrière Miséry, à Nantes...
Autrement dit, l’on ne soupçonne pas le nombre de carrières, anciennes (innombrables) ou en activité, dans un département tel que la Loire-Atlantique. Citons tout particulièrement, dans notre secteur géographique, sur Blain, la grande carrière de Barel (exploitée par la Socalo, du groupe Landais), à deux pas du site bucolique du pont et de l’écluse de Barel. Sa capacité annuelle en matériaux extraits s’élève à 1,2 million de tonnes (une production à comparer aux volumes nettement plus modestes escomptés au Tahun, voir plus loin). Et, manifestement, tout n’est pas rose non plus de ce côté-là, malgré une exploitation qui se veut raisonnée et exemplaire, dans « un emplacement idéalement situé entre Nantes et Rennes pour un rayonnement facilité dans le grand ouest » (https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/guenrouet-44530/les-riverains-de-la-carriere-de-barel-sont-inquiets-5590760). S’agissant des aspects historiques et géographiques, les personnes intéressées pourront utilement se reporter à ces travaux universitaires de grande érudition sur « Les carrières abandonnées en Loire-Atlantique » : https://cahiers-nantais.fr/index.php?id=1039 et https://cahiers-nantais.fr/index.php?id=1136.
Il convient, enfin, de mentionner l’existence, juste avant d’accéder à la carrière depuis la D42, d’un dépôt de matériaux appartenant au groupe Charier (secteur Carrières et Recyclage de Matériaux). L’origine de cette présence s’explique certainement par l’ancienne activité extractrice de la carrière du Tahun. Comme on le voit, il y en a pour tous les usages, et « il n’y a plus qu’à se servir » !
Laisser la Nature reprendre ses droits… pour mieux la saccager ?!
Cependant, aussi pertinents que puissent être considérés les éléments susmentionnés, l’on ne saurait y trouver matière à justifier de quelque manière que ce soit l’autorisation de réouverture de la carrière du Tahun, fermée il y a seulement… trente-cinq ans !
Car il s’agit de lieux qui, au fil des années, ont eu amplement le temps de retourner à la Nature. La colonisation par les végétaux – à commencer par les arbres (ces arbres que, désormais, l’on s’évertue tant, partout, à protéger et développer) – a magnifié les qualités physiques et paysagères du site et est allée de pair avec un enrichissement de la biodiversité.
Sans même élaborer plus avant en étayant le propos par d’utiles études naturalistes et autres, cela saute aux yeux que la beauté singulière du site et la remarquable beauté du paysage – entre les roches de l’ancien front de taille, les pins, le plan d’eau – devraient suffire à mettre ce lieu hors d’atteinte de toute volonté de réexploitation du site et de réouverture de la carrière. Et ce, a fortiori, dans le contexte actuel d’un agenda on ne peut plus prégnant en termes d’environnement, de transition écologique, climatique, énergétique, d’effondrement de la biodiversité.
Pour quelle logique, quels avantages, quelles retombées fiscales somme toute maigrelettes pour les collectivités locales, faudrait-il mettre à mal ce qui est devenu un écosystème à part entière, un lieu paisible de détente qui ne demande qu’à être magnifié, et non saccagé ?
Il aurait été dans l’intérêt général de ne pas laisser prospérer le projet de réouverture du groupe Pigeon, encore propriétaire des lieux trente-cinq ans après la fin de l’exploitation (?!). Des lieux qui ne nécessiteraient pas de moyens démesurés pour que l’accès et l’accueil en soient grandement améliorés. Il aurait fallu pour ce faire la vision, le volontarisme, l’ambition d’une municipalité à la hauteur de cette pépite présente sur son territoire, à même d’opérer la priorisation qui doit s’imposer dorénavant sur ce type de dossiers.
En somme, comme devrait le faire l’ONF pour la proche forêt domaniale du Gâvre – si le concept de multifonctionnalité marchait vraiment – la priorité devant revenir à la biodiversité, à l’accueil du public, à la qualité paysagère, au climat, l’exploitation forestière devant passer après.
L’arrêté préfectoral peut bien empiler les précautions et obligations à respecter par l’exploitant, visant à atténuer, voire prétendre supprimer, les désagréments en termes de bruit, de poussières, de circulation, etc. Les conséquences préjudiciables de cette réexploitation seront bien perceptibles pour tous ceux qui habitent alentour, et au-delà, dont la qualité de vie sera très significativement altérée pendant au moins quinze longues années, la durée d’exploitation prévue. Et qui devront subir le triste héritage qu’on leur laissera.
Nombre d’élus l’ont bien compris. Et ils n’apprécient guère ce qui les attend, pour leurs administrés comme pour leurs infrastructures, que ce soit du côté de Guénouvry, de Conquereuil, de Marsac ou ailleurs. Comment pourrait-il en être autrement ? Qui veut le dérangement, le bruit, le danger, la poussière et la détérioration des chaussées liés au passage des camions, quand bien même les voies pouvant être empruntées ont été limitées ?
Les populations locales l’ont bien compris, qui se mobilisent depuis un bon moment déjà. Elles ont formé un collectif, le bien nommé Collectif Carrière Tahun. Celui-ci avait fourbi tant d’arguments de bon aloi qu’il ne pensait pas qu’une décision aussi pernicieuse et aussi peu attentive à l’intérêt général pourrait être prise. Mais la combativité demeure. Elle mérite d’être soutenue avec force et détermination. Y compris en espèces sonnantes et trébuchantes, car le collectif ne peut plus faire l’économie d’un recours contentieux en justice.
Pour leur part, la commune de Conquereuil, la commune du Gâvre, mais aussi le Conseil départemental ont déposé des recours gracieux.
Les Amis de la Forêt du Gâvre ne sauraient se désintéresser d’un projet censé intervenir à trois kilomètres seulement de ce massif forestier que nous sommes déterminés à défendre, pour lequel il faut une inversion des priorités et des pratiques de sylviculture et de gestion afin que celles-ci se conforment bien davantage aux attentes de notre époque et à la nature suburbaine de cette forêt, à proximité d’un grand pôle métropolitain.
Comment, en effet, se désintéresser, de ce site magnifique et de tant d’arbres voués, sinon, à disparaître ou à être malmenés de multiples façons ? Car il va de soi que défendre la forêt du Gâvre, c’est aussi, nécessairement, défendre son périmètre, les milieux environnants, le bocage, les haies et bois des alentours, que ce soit contre un projet de parc éolien en lisière de forêt (?!) ou un projet de réouverture d’une ancienne carrière retournée à la Nature.
Du patrimoine et du pittoresque en abondance
Ce projet (son autorisation par la préfecture et son aval de bout en bout par la municipalité de Guéméné-Penfao) est d’autant plus invraisemblable et inacceptable que l’on se trouve là à deux pas de la très pittoresque et touristique vallée du Don, que les itinéraires balisés de randonnée ne manquent pas, que ce terroir ne demande qu’à être encore mieux valorisé par ce site unique, et non dévalorisé, pour ne pas dire saccagé.
Le Tahun offre un paysage particulièrement attachant, comme peut l’être un promontoire aux pentes couvertes de bois, dont de nombreux châtaigniers, présentant des affleurements rocheux, dominant la belle campagne environnante, hébergeant en son point culminant une chapelle.
Et quelle chapelle ! Une chapelle dite des Lieux-Saints, dédiée à Saint Méen et au caractère breton très marqué, magnifiquement décorée (fresques et vitraux), qui accueille de longue date un pardon annuel encore bien suivi, sur un site que fréquentèrent des générations d’enfants des communes environnantes dans le cadre du patronage. La voie des Capitales, passant non loin du site par Guéméné et Guénouvry, est l’un des chemins menant à St-Jacques-de Compostelle (depuis le Mont St-Michel). Il existe aussi sur le versant, en arrière de la chapelle, une « grotte » avec petit escalier et statue de la Sainte-Vierge, et en contrebas, une source guérisseuse à laquelle il était prêté des vertus miraculeuses. Le promeneur a tout loisir de découvrir l’histoire des lieux grâce à un livret reproduit en grand format et mis à disposition à l’extérieur de la chapelle, Sainte-Anne de Lieu-Saint, la chapelle et son pèlerinage, dont l’auteur n’est autre que l’historien nantais bien connu Jean Bourgeon (le livret complet de 44 pages fait partie d’une série de livrets historiques et patrimoniaux qu’a fait réaliser et que met à disposition sur son site la commune de Guéméné-Penfao : http://www.mairie-guemene-penfao.fr/patrimoine/). Non loin de là passait aussi une importante voie romaine dont il reste quelques vestiges (lieu-dit de Pont Veix). Et l’on peut encore ajouter à cette liste tout à fait significative d’éléments patrimoniaux l’alignement mégalithique du Pilier, dans la partie nord, la plus proche, de la forêt du Gâvre, rien de moins que probablement le plus long alignement d’Europe !
Voilà bien des raisons de préserver et valoriser un site qui dispose de tant d’atouts, plutôt que de mettre en péril cet ensemble cohérent, où tout se tient, et de l’abandonner à une logique purement mercantile qui le laissera meurtri et défiguré, au lieu de laisser tranquille ce qui ne serait jamais qu’une nième carrière, laquelle pensait en avoir fini avec l’exploitation et avoir mérité son repos.
Et revoilà le gimmick des mesures « compensatoires »
Que l’on n’aille surtout pas croire que les mesures censées être prises en fin d’exploitation pour la remise en état du site sont de nature à garantir un véritable « retour à la nature ». Il n’est quasiment jamais assuré que les mesures dites de compensation puissent bénéficier du suivi scientifique ou technique initialement prévu, ne serait-ce qu’en raison du coût et de la nécessaire durée d’un tel suivi. Cette manière de faire ressemble diablement à du greenwashing. Et il est évident que, même si la totalité des arbres et de la flore existante ne va pas être détruite et rasée pendant les quinze ans que doit durer la réexploitation de la carrière, en particulier sur le pourtour, les répercussions de ces activités d’extraction et d’enfouissement ne peuvent qu’être préjudiciables à la bonne santé, à l’épanouissement et au développement des peuplements existants, notamment du fait des poussières et des graves perturbations occasionnées au circuit de l’eau.
Comme le dit fort bien Francis Hallé, le grand spécialiste mondial des forêts primaires : « Dix jeunes arbres ne remplacent pas un vieux : un quart de siècle au moins sera nécessaire avant que la dépollution atmosphérique ne retrouve son niveau initial. » Autrement dit, où est la logique de remettre les compteurs largement à zéro et d'attendre quinze ans pour escompter réactiver le processus de retour à la Nature (et à partir d'un site qui sera alors bien plus dégradé) ? Et ce, alors même qu’il n’y a plus aucun temps à perdre sur le front des transitions à opérer, et que ce processus de retour à la Nature est d’ores et déjà très avancé sur le site, ce qui n’a rien d’étonnant après quelque trente-cinq ans de tranquillité !
Cela revient à faire bien peu de cas de toute la biodiversité présente, qui n’est en rien négligeable. Comme d’habitude dans pareils dossiers (le cas du projet d’aéroport de NDDL est on ne peut plus emblématique à cet égard : il y avait un monde entre ce qu’avaient trouvé les études officielles et les inventaires refaits sur la durée par Les Naturalistes en Lutte…), la richesse des lieux est sous-estimée, et les espèces protégées sont insuffisamment prises en compte, quand elles ne passent pas carrément sous les radars. Quid, par exemple, de la… sibthorpie d’Europe, récemment découverte au Tahun, quasi menacée de disparition [NT] dans la région, une plante qui est « déterminante ZNIEFF » ? Quoique hors du périmètre immédiat de la carrière, celle-ci serait forcément vouée à disparaître. Comment en effet cette petite plante repérée en bordure du Tahun pourrait-elle résister lorsque ce paisible ruisseau se verrait obligé d’écouler jusqu’à 25 m3/h ?! L’on est, une fois de plus, devant des inventaires officiels aussi incomplets qu’obsolètes (2013), alors que, rien qu’en 2022-23, il a été possible de découvrir plus de 22 espèces de plantes supplémentaires sur le secteur du Tahun.
Granulats et déchets en veut-tu en voilà !
Et pourquoi donc, finalement, faudrait-il malmener à ce point la faune et la flore d’un site magnifique qui a trouvé sa cohérence après tant années d’inactivité, et priver les populations locales d’un lieu aussi remarquable de promenade et de détente, dont la forte dimension patrimoniale est depuis très longtemps avérée ?
Tout simplement pour ceci :
2024-28 :
-
Préparation de l’emprise de 11 hectares aux fins de sa mise en exploitation, se traduisant par la destruction de la faune et de la flore présentes ;
-
Elimination de 150 000 m3 d’eau douce, soit le contenu du plan d’eau actuel, pompé, décanté et rejeté dans la rivière du Tahun qui se jette dans le Don tout proche ;
-
Extraction de 900 000 tonnes de roches, à un rythme annuel de 180 000 tonnes (pouvant atteindre 250 000 tonnes maximum) ;
-
Enfouissement de 80 000 tonnes de déchets, à un rythme annuel pouvant atteindre 36 000 tonnes maximum.
2029-33 :
-
Extraction de 900 000 tonnes de roches supplémentaires, à un rythme annuel de 180 000 tonnes (pouvant atteindre 250 000 tonnes maximum), soit un total cumulé 2024-33 de 1 800 000 tonnes ;
-
Enfouissement de 80 000 tonnes de déchets supplémentaires, à un rythme annuel pouvant atteindre 36 000 tonnes maximum, soit un total cumulé 2024-33 de 160 000 tonnes de déchets.
2034-38 :
-
Extraction de 900 000 tonnes de roches supplémentaires, à un rythme annuel de 180 000 tonnes (pouvant atteindre 250 000 tonnes maximum), soit, précisément, une extraction totale cumulée 2024-38 de 2 610 000 tonnes de roches ;
-
Enfouissement de 80 000 tonnes de déchets supplémentaires, à un rythme annuel pouvant atteindre 36 000 tonnes maximum, soit, précisément, un enfouissement total cumulé 2024-38 de 288 000 tonnes de déchets ;
-
Ennoiement du fond de fouille, soit d’une superficie de 7,4 hectares, de sorte que dans la zone d’enfouissement sur une épaisseur de 30 m (soit un immeuble de 9 étages), les déchets se trouveront immergés dans le lac résiduel ainsi formé.
Les déchets en question sont des déchets dits inertes, en provenance de l’industrie du BTP. L’arrêté préfectoral est prolixe en matière de mesures environnementales à respecter par l’exploitant pour limiter ou éviter les nuisances dues au bruit, aux poussières, aux matières et rejets à caractère polluant, etc. Difficile, cependant, de ne pas porter un regard plus que circonspect sur la capacité de ces mesures et surtout de leur mise en œuvre effective à éviter les effets délétères de l’enfouissement de tels déchets, d’autant que certains pourraient se révéler être moins « inertes » qu’initialement prévu.
Cette eau si précieuse
En effet, plus encore que les déchets, c’est bien sûr la gestion de l’eau, telle qu’elle est envisagée dans l’ensemble de ce dossier, qui pose le plus problème :
-
Se débarrasser de pas moins de 150 000 m3 d’eau, et d’eau douce qui plus est, en ne trouvant rien de mieux à faire que de jeter ce volume très conséquent dans le petit cours d’eau le plus proche (le Tahun) qui ira aussitôt le déverser dans cette belle et pittoresque rivière qu’est le Don. Déverser tant d’eau, fut-elle non polluée, ne peut qu’avoir des conséquences désastreuses sur les écosystèmes de ces rivières, qu’il s’agisse du vivant, faune et flore, ou des aspects physiques et hydrologiques ;
-
Il est insensé, et tout bonnement irresponsable, de gaspiller ainsi ces dizaines de milliers de mètres cubes d’eau. Non seulement parce que cela ruine la qualité paysagère et l’attractivité du site dont le plan d’eau est une composante essentielle. Mais également au regard des problèmes toujours plus prégnants en lien avec cette ressource précieuse et de plus en plus rare qu’est l’eau douce – accès, usages, pénuries récurrentes…
-
Comment, en particulier, pourrait-on accepter qu’un tel volume d’eau ne soit pas précieusement conservé afin de parer à toute éventualité d’un incendie majeur ou d’incendies à répétition, non seulement qui se déclareraient sur le territoire, en campagne ou en zone d’habitation, mais surtout, évidemment, sur la forêt toute proche (3 km à peine) du Gâvre. Cette forêt domaniale couvre pas moins de 4 500 hectares et l’on serait bien avisé de laisser toute cette eau à disposition des services incendie, plutôt que d’attendre qu’un désastre n’arrive (comme cela aurait pu être le cas lors de l’été 2022 particulièrement sec).
-
Le Tahun, on l’a compris, forme un promontoire rocheux qui domine la région. De ses flancs s’écoulent pas moins de six sources. Et plusieurs plans d’eau et zones humides existent à proximité immédiate. Méritent plus particulièrement d’être mentionnées :
-
La source des Rivières : à 20 m d’un petit calvaire se trouve là un bassin (de forme rectangulaire, délimité par la paroi rocheuse sur un long côté et par trois murets de pierre sur les autres côtés). Ce bassin collecte les sources qui s’écoulent de la roche. Ce point d’eau ne s’est jamais tari, pas même lors de la grande sécheresse de 1921 qui affecta toute l’Europe (il tomba deux fois moins d’eau cette année-là que lors de la grande sécheresse de 1976 !) et qui vit la Chère et le Don s’assécher. Ce réservoir fut l’un des rares points d’eau qui permirent aux habitants et au bétail de toute la contrée de survivre ;
-
La source St-Méen : son eau s’écoule en milieu de faille entre les schistes bleus de Nozay et les grès d’Abbaretz. Saint Méen est un saint breton guérisseur bien connu (né au 6e siècle) dont les croyants espéraient l’intercession par leurs prières pour guérir principalement le mal Saint-Méen (la gale) et autres dermatoses. Signalée dès le cadastre de 1834, mais malmenée par l’élargissement de la route, la fontaine a perdu son mur et sa statue : seuls demeurent un trou d’eau et le petit calvaire. Hélas, ce patrimoine pittoresque serait inévitablement anéanti si la carrière devait être réexploitée : à moins de 200 m de là, l’excavation descendra jusqu’à 20 m NGF (Nivellement Général de France : altitude par rapport au niveau 0 qui est le niveau moyen de la mer à Marseille), alors que la source jaillit à 30 m : elle serait donc vouée à disparaître !
-
Autrement dit, non seulement l’on est en présence d’une faille (parfaitement connue), mais tout pointe vers le fait qu’il faut bien convenir de l’existence d’un aquifère (= corps de roches perméables comportant une zone saturée suffisamment conductrice d'eau souterraine pour permettre l'écoulement significatif d'une nappe souterraine et le captage de quantité d'eau appréciable. Pour en savoir plus, par ex. https://www.u-picardie.fr/beauchamp/cours.qge/du-7.htm).
La circulation souterraine d’eau serait nécessairement gravement perturbée et il n’est pas possible, en dépit de toutes les mesures censées être prises, d’exclure la possibilité bien réelle de voir les déchets de BTP immergés dans la carrière venir polluer de diverses manières cet aquifère, ceci ne pouvant que se répercuter défavorablement sur les sources du Tahun et les rivières dans lesquelles leurs eaux aboutissent, à commencer par le Don.
Un joyau enchanteur qui mérite mieux que d’être réduit à néant à coup d’explosifs !
Il ne fait guère de doutes qu’en présence d’un tel joyau sur son territoire, plus d’une collectivité n’aurait eu de cesse de vouloir en tirer le meilleur parti pour le plus grand nombre de ses administrés et visiteurs en y apportant, au minimum, ces aménagements nécessaires et suffisants de nature à en éliminer les risques les plus évidents, inhérents aux carrières abandonnées, et à en faire une ces bases de loisirs prisées des municipalités comme du grand public (sur le concept et son évolution, https://fr.wikipedia.org/wiki/Base_de_plein_air_et_de_loisirs). Pourquoi ne pas rappeler également que la belle endormie qu’était encore cette carrière fut même (24-26/05/15) le théâtre… d’une rave party qui combla quelque six mille teufeurs (!) (https://www.youtube.com/watch?v=iFbD84-BE4A), et que (comme en attestent d’ailleurs quelques vidéos…) la jeunesse sut plus d’une fois s’adonner aux joies irrépressibles de la baignade interdite dans un cadre magnifique. Alors, sans doute, le plus gros défi n’aurait pas tant été celui de sécuriser le site (des accidents ont déjà pu avoir lieu, comme celui rapporté en 2017 d’un nageur qui s’était malencontreusement blessé), mais plutôt de trouver la bonne manière d’harmoniser, avec intelligence et juste mesure, loisirs aquatiques, patrimoine, randonnées et biodiversité. En préservant l’eau, cette ressource si précieuse.
Gageons que cette harmonie aurait pu être obtenue – pourrait encore l’être s’il était renoncé à ce funeste projet – avec d’autant plus de facilité qu’il suffit de quelques images, de quelques plans d’une vidéo, de quelques instants sur place pour être véritablement fasciné par la beauté singulière du lieu et vouloir en préserver tout le charme. Pour peu que la lumière chaude d’un soleil couchant ou d’une belle journée d’hiver soit au rendez-vous et vienne poser ses rayons sur les grès et les pins, le visiteur se retrouve soudain dépaysé, comme projeté dans les Rocheuses, dans un paysage digne de l’Ouest américain, contemplateur d’une nature enchanteresse…
Presse locale (non exhaustif)
03/10/20
01/04/21
Guémené-Penfao. Carrière du Tahun : le collectif mobilise 140 personnes
17/09/22
18/09/22
20/11/22
EN IMAGES - A Guémené-Penfao, ils disent non à la réouverture de la carrière du Tahun
05/02/23
04/03/23
11/07/23
Le groupe Pigeon autorisé à extraire la roche de la carrière de Tahun, au grand dam d’un collectif
31/07/23
L'exploitation de la carrière de Tahun divise à Guémené-Penfao
25/08/23
Au Tahun, les travaux de réouverture de la carrière ont démarré, un collectif manifeste
23/09/23
Vidéos
19/11/2022
Film Collectif Carrière Tahun 2022 - YouTube
https://www.youtube.com/watch?v=_lG1Ndg7w8o
12/09/21
La Chapelle des lieux saints et la carrière de Guénouvry